Minervois, au cœur du Languedoc
« Le Minervois (Menerbès en occitan) est une région naturelle de France située dans la région Languedoc-Roussillon, à cheval sur les départements de l'Hérault et de l'Aude. C'est un pays de basses collines qui s'étend de la Montagne Noire, au nord, jusqu'au fleuve Aude, au sud, lequel le sépare des Corbières. Olonzac, important carrefour de routes, en est le principal centre économique. Son nom vient du village de Minerve (Hérault), classé parmi les plus beaux villages de France et haut lieu de la croisade contre les cathares. Onze communes en portent aujourd'hui le nom, depuis Villeneuve-Minervois à l'ouest jusqu'à Bize-Minervois à l'est. »
Voici l’introduction que l’Encylopédie « libre » (donc non-contrôlée), Wikipédia, fournit si vous tapez l’entrée « Minervois ». Je ne suis pas certain de savoir ce qui définit une région « naturelle », par opposition à une région supposée être « artificielle », mais, à cette exception près, l’introduction peut tenir. Pour ceux qui habitent plus loin que l’hexagone, on ajoutera qu’il s’agit d’une zone située dans le sud de la France près de la mer, et donc sous une forte influence méditerranéenne sur le plan climatique. L’aire viticole du Minervois forme une sorte de rectangle étalé sur un axe est-ouest, ayant pour base les villes Narbonne à l’est et de Carcassonne à l’ouest, soit une longueur d’environ 60 kilomètres. Dans cette partie sud, traversée par le Canal du Midi et la rivière Aude, les altitudes sont inférieures à 100 mètres. Il s’agit d’une sorte de plaine parsemée de bosses plus ou moins prononcées. En remontant entre 20 et 30 kilomètres vers le nord, le paysage change radicalement de relief en se déployant sur le versant sur de la Montagne Noire et des Causses, pour atteindre, par endroit, 450 mètres d’altitude. Cela forme une sorte de grand amphithéâtre aplati, faisant face, un peu de biais, à la Méditerranée. L’aire totale de l’appellation, qui est très découpée à l’intérieure du rectangle, couvre une surface de quelques 27,000 hectares. Seulement 11 000 ha sont effectivement plantés aujourd’hui, dont 4700 hectares pour produire des vins d’AOP (ex AOC), en Minervois et Minervois La Lavinière.
Comme toujours, des variations locales de relief et d’exposition ajoutent pas mal de piment et de précision à cette vague esquisse, ce qui a provoqué, entre autres effets concrets, la désignation d’une appellation plus restreinte dans la partie centrale et septentrionale du Minervois, sous la désignation Minervois La Lavinière. Cela plaît beaucoup aux producteurs qui en bénéficient (le syndrôme du « small is beautiful » a des beaux jours devant lui en France !), mais n’est pas toujours très pertinent pour comprendre les subtilités entre les vins qui, comme toujours, dépendent surtout de l’emplacement particulier d’un vignoble donné, des choix faits en matière de cépages et de méthodes de culture et, surtout, de la volonté et des moyens du producteur. Autrement dit, il existe des vins sous l’appellation Minervois qui valent largement des vins vendus sous l’appellation Minervois-Lavinière, mais le prix moyen d’une bouteille de Minervois-Lavinière est bien supérieur à celui d’une bouteille de Minervois. La solution pour le consommateur est donc, comme toujours, de chercher les bons producteurs, et de ne pas trop se fier à une appellation. Dans la dégustation à l’aveugle dont je rends compte ci-dessous, les trois vins que j’ai préféré proviennent de l’appellation Minervois. Si on veut à tout prix généraliser, on peut dire que les vins de Minervois Lavinière semblent, globalement, plus concentrés que ceux du Minervois. Peut être cela est-il attribuable à un méso-climat un peu plus sec, mais peut-être aussi au fait que les vignerons y cherchent davantage d’extraction. Enfin, dans cette affaire, comment comparer directement des vins dont les écarts de prix peuvent aller du simple au triple, voir au-delà ?
Il n’est pas réellement plus utile pour comprendre la production de cette belle région de regarder sous la terre en insistant sur le nature géologique des sols. Comme souvent dans des zones qui ont subi bon nombre de bouleversements géologiques dans le temps, cette nature est constituée d’une véritable mosaïque de types de sols, qui, parfois, peuvent co-exister sur la même propriété. On dénombre du calcaire, parfois très blanc et assez dur, du grès, un peu de schiste, puis des zones ou tout est mélangé sur des terrasses déposées en alluvions mixtes et plus ou moins caillouteux. J’ai trouvé du très bon, du bon et du médiocre sur tous ces types de sols. Pour savoir si un vin du minervois est bon ou pas, il est bien plus utile de se fier au résultat final, donc au travail de tel ou tel producteur, qu’à une carte géologique. Je sais que la théorisation passionne les français, mais cela me laisse un peu de marbre (oui, je sais, encore une structure géologique !), tant l’influence des vignerons et de leurs choix me semble prépondérant dans les caractéristiques d’un vin. Nous verrons la démonstration de cela dans les résultats de cette large dégustation de vins du millésime 2009, effectuée au mois d’octobre 2010. J’indique, pour ceux qui s’y intéressent, la zone géologique sous le nom de chaque vin, car la dégustation fût ainsi ordonnée.
Dernier element qui peut aider à comprendre la nature de ces vins du sud : l’encépagement. L’assemblage est la règle ici, car celui qui veut produire un vin issu d’un cépage unique (syrah, carignan ou grenache, par exemple), le fait sous une dénomination vin de pays. La syrah représente aujourd’hui la moitié des surfaces de l’ensemble du vignoble. Il est suivi en ordre d’importance par le grenache et le carignan, ce dernier en régression. On trouve aussi un peu de mourvèdre et un résidu de cinsault. Les règles pour les assemblages me paraissent inutilement complexes.
Minervois et Minervois-Lavinière rouge, millésime 2009
(résultats d’une dégustation à l’aveugle du 24 octobre 2010)
conclusion générale
Dans l’ensemble, des vins d’un bon niveau, avec assez peu de défauts criants : une peu de sur-extraction de tanins ici, du boisé légèrement excessif là, et le lot habituel de vins dont les raisons n’étaient pas suffisament murs. J’étais agréablement surpis par le bel équilibre et fraîcheur de la majorité des vins, dont très peu présentaient un déséquilibre en faveur de l’alcool. Je recommande 19 vins sur les 51 présentés, et bien d’autres n‘étaient pas très loin de ce niveau. J’étais particulièrement impressionné par le rapport qualité/prix des vins à moins de 10 euros. Il y a de très bonnes affaires en Minervois pour le consommateur !
Mes meilleurs vins parmi les 51 échantillons dégustés
(il est à noter que la plupart de ces vins étaient en bouteille, mais que quelques-uns étaient des échantillons en cours d’élevage)
Mon coup de cœur ****
Anne Gros et Jean-Paul Tollot, (cuvée inconnue), Minervois
(le nom de la cuvée était malheureusement égaré par les organisateurs de cette dégustation. Je regouterai plus tard les cuvées de ce producteur d’origine bourguignon pour essayer d’éclaircir cette question)
prix : 15/20 euros
zone géologique : calcaire et schistes
Intensément et précisément arômatique, bien plus que les autres vins de la série. C’est aussi beau que singulier. Texture lisse sur une très belle structure. Matière très fine, vin délicieux, superbe. Mon vin préféré de toute la dégustation.
Les vins notés avec ***
La Croix de Saint Jean, Lo Mainatge, Minervois
zone géologique : calcaire et schistes
prix : environ 12 euros
Le fruité, très proche du cassis, est splendide et intense, aussi bien au nez qu’en bouche. Vin juteux, d’une belle longueur, avec juste un soupçon d’impression de chaleur en finale.
L’Ostal Blanc, Jocoso, Minervois
zone géologique : terrasses
prix inconnu
La qualité du fruit est bien mise en valeur par une très belle texture. Un vin qui est aussi élégant que long : chose pas si courante dans la région.
Les vins notés avec **
Château de Cesseras, Minervois-Lavinière
zone géologique : grès
prix : 12 euros
Une belle matière avec beaucoup d’intensité dans le fruit. C’est relativement suave de texture et long.
Château du Donjon, cuvée Prestige, Minervois
zone géologique : terrasses
prix : environ 10 euros
Un très joli nez qui définit bien le fruité. L’ensemble en bouche est vibrant et gourmand. Un vin délicieux et parfaitement équilibré.
Château L’Ostal Cazes, Grand Vin, Minervois-Lavinière
zone géologique : grès
prix : environ 14 euros
Vin bien concentré, dense, avec beaucoup de concentration dans le fruit. Belle longueur avec une pointe de chaleur en finale.
L’Ostal Blanc, Prima Donna, Minervois-Lavinière
zone géologique : terrasses
prix inconnu
Intensément parfumé au nez, avec des arômes de ciste et d’arômates. Matière juteuse et vibrante. Excellent équilibre.
Château Mirausse, l’Azerolle, Minervois
zone géologique : grès
prix : environ 7 euros
Une très belle matière, intense et élégante. Beaucoup de présence et de longueur en bouche. Excellent.
Domaine Jean-Baptiste Senat, La Nine, Minervois
zone géologique : terrasses
prix : 8,50 euros
Belle matière fruité, dont l’intensité conserve un caractère allègre et gourmand, sans verser dans l’excès.
Château Villerambert Julien, Minervois
zone géologique : calcaire et schistes
prix : 15 euros
Le nez est fermé à ce stade, mais la matière est dense, avec une extraction relativement importante. Encore en cours d’élévage (comme pas mal d’autres vins dans cette fourchette de prix), on sent le potentiel même s’il n’est pas facile à juger aujourd’hui.
Les vins notés avec *
Château d’Agel, Agellum, Minervois
zone géologique : calcaire et schistes
prix : 6 euros
J’ai donné exactement la même note (14,5/20) à ce vin lors de deux dégustations, dont celle-ci conduite à l’aveugle. Une belle matière construite autour d’un bon fruité. Délié et charmeur, ce très joli vin est une des meilleurs affaires de cette dégustation. J’ai dégusté, à part, d’autres cuvées de ce domaine, dans des millésimes plus anciens (2007 et 2008) , et il s’agit clairement d’un domaine très bien mené qui est à suivre.
Château de Cesseras, cuvée Olric, Minervois
zone géologique : grès
prix : 6 euros
L’atout majeur de ce vin est la qualité de son fruit. C’est charnu et même assez dense, avec une belle matière lisse. Bonne longueur et équilibre. Excellente affaire !
Domaine Cros, vieilles vignes, Minervois
zone géologique : grès
prix : environ 10 euros
La matière est intense et assez vibrante. Outre une pointe agréable d’amertume en finale, ce vin possède équilibre et longueur.
Château Coupe Roses, Granaxa, Minervois
zone géologique : calcaire et schistes
prix : 6 euros
Je ne suis pas toujours fanatique des vins faits avec le seul cépage grenache, car ils tendent souvent vers trop d’alcool et de souplesse. Mais ce vin à un très joli nez de fruits noirs, et, en bouche, est à la fois ciselé et gourmand, tout à fait délicieux. A signaler aussi (dégustés à part), des vins blancs remarquables de cette propriété, faits avec les cépages roussanne et marsanne.
Château Laville-Bertrou, Minervois
zone géologique : grès
prix : environ 10 euros
Une très belle matière, intense, vibrante et longue. Les tannins sont encore un peu serrés, mais l’équilibre générale est bonne et il sera au point dans 6 mois.
Château de Millegrand, Minervois
zone géologique : terrasses
prix inconnu
Vin juteux et élégant, avec une texture soyeuse qui met bien en valeur les qualités de son fruité.
Château Saint Jacques d’Albas, Minervois
zone géologique : grès
prix : environ 10 euros
Un joli vin, allègre et précis dans ses saveurs. J’aime sa finesse de texture. La matière n’est pas très dense, mais l’ensemble est bien équilibrée.
Château Sainte Eulalie, La Cantilene, Minervois-Lavinière
zone géologique : calcaire et schistes
prix : environ 10 euros
Le fruité est très expressif au nez, comme le boisé. En bouche le vin est charnu et le bois est encore un peu trop présent à mon goût. Mais la qualité sous-jacente est bien là. Espérons que l’élévage va s’absorber, mais ce style peut plaire.
Domaine de Sicard, Hommage à Elie, Minervois
zone géologique : calcaire et schistes
prix : 8 euros
Un vin vibrant et relativement intense. Parfaitement équilibré, très agréable et d’un très bon rapport qualité/prix .
Mieux vaut le Château Coupe Roses que le Château Couperose, décidément très alcoolique, et qui marque les joues!
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